mercredi 29 janvier 2014

Réponse à Claudie Baran/Article du Figaro "Madagascar, l'enfer du décor"

Droit de réponse à Madame Claudie Baran pour son article :  "Madagasikara, l'enfer du décor"

"Chère madame Baran merci d’avoir diffusé un article sur Madagasikara, l’occasion est assez rare pour qu’elle soit soulignée.

Mais là nous la surlignerons plutôt, car vous faites de ce grand pays une terre qui porterait en elle 22 millions de meurtriers-mendiants-prostitués-exploités dans un sanctuaire de la barbarie, de l’acculture et de la décadence. Comment permettre l’objectivité avec autant d’éléments à charges, quelle image burlesque avons-nous d’une terre une fois et demie plus grande que la France, qui subit depuis 2009 un régime non élu qui a été suffisamment soutenu (de qui ?)pour pouvoir perdurer jusqu’ici, et qui forcément est dans un état comateux avec une économie asphyxiée et un peuple malmené depuis le renversement politique. Burlesque en cela que l’on ne peut écrire en amnésie et en tirant les éléments hors contexte et hors temps pour en tirer une généralisation.

Il faudrait tout de même vous rapprocher des nombreux articles qui faisaient état de l’ile avant qu’elle ne perde pied définitivement au travers de faits qu’elle est la première à regretter et qui ne sont absolument pas légion.

Dans l’express daté de 2013 (http://www.lexpress.fr/diaporama/diapo-photo/tendances/voyage/top-10-des-plus-belles-destinations-pour-son-voyage-de-noces_1218050.html?p=3)  et même dans le Figaro (http://www.lefigaro.fr/voyages/2013/02/08/03007-20130208ARTFIG00502-madagascar-rendez-vous-au-bout-du-monde.php) daté également de 2013. Vous savez que le web est suffisamment bien construit pour en trouver d’autres.


-Nosy Be : La victime évoquée a subit un sort qui a scandalisé l’opinion publique malagasy y compris,  en même temps qu’un malagasy n’étant autre que l’oncle de l’enfant émasculé  et qu’une autre personne que l’on a décrite comme franco-Italienne. Ne parler que du « vazaha » qui ne restreint pas le terme à « blanc » comme vous le dites, mais veut dire « étranger » ôte une partie des faits qui eux, ne peuvent être remis en cause.


« A Nosy Be, station balnéaire vantée par les dépliants touristiques, la prostitution infantile est une réalité plus crue. (…)la ­pédophilie, via des relations tarifées ; et le trafic d'organes »
Vous allez bien vite en besogne, si la prostitution et la pédophilie, le tourisme sexuel, sont  au centre de Nosy Be il faut aussi savoir dire que les touristes qui viennent s’échouer certaines fois viennent comme en Thaïlande par exemple, avec comme obsession de pouvoir faire chez les autres ce que chez eux la loi réprime avec un état policier fort, ils viennent profiter d’une misère et d’un contexte déstrcuturant, et se départissent de tous scrupules. Que dire aussi à celui qui vient fouler le sol malagasy et qui tombe dans ce type de délit, la loi d’ailleurs permet depuis peu, tant la réalité est palpable,  de poursuivre les hommes concernés jusqu’en France.

Madagasikara et NOSY BE sont des lieux époustouflants et les étrangers le savent.Nosu Be est classée parmi les dix sites les plus paradisiaques du monde. Nombres de reportages, vantent même les français ou autres origines qui sont venus louer à coup de baux emphytéotiques sur 99ans des maigres mètres carrés à 1 voire 2 euros pour le plaisir de s’exiler et de profiter des lieux authentiques et accueillants, jusqu’ici tout va bien dans le meilleur des mondes, cela ne choque personne.Il suffit de s’attarder des nombreux coins sombres et alcoolisés pour vite être percuté par la réalité crue, des mains baladeuses et permissives qui palpent des corps fermes et prépubères… L’émission « j’irai dormir chez vous » tournée à Madagasikara fait une halte à Nosy Be, un homme étranger dit très clairement que les hommes ne viendraient même … que pour ça.
(J'irai Dormir Chez Vous - Madagascar (intégrale))


-« Une gamine, le nez morveux, les yeux brûlés par l'essence qu'elle sniffe, exhibe son étrange poupée à l'étranger » OUI les enfants mendient, oui la situation est si critique que les précarités se morfondent encore plus. Mais nous sommes bien loins des réalités des « gosses » de Manille, à Madagascar ce qui va être relevé par les ONG concernant les enfants restera en premier lieu qu’ils travaillent ou qu’ils sont peu scolarisés, vu la crise, la famine viendra aussi se rajouter à cela.
-Une semaine pour faire TANA-Tuléar : RN7 vous avez mis une semaine quand en taxi brousse on met deux jours.

Si on doit comme ailleurs porter une attention particulière à la sécurité quand on va se promener dans des lieux isolés dans les conjonctures de crises accrues, voilà un reportage tourné en 2011 qui viendra tordre le cou à la vision apocalyptique que vous partagez. (Madagascar,Nationale 7, Route du Sud, Tananarive, Tulear, Morondav).


-Les dahalos : Tout la charge vaudou-gri-gri-rolex que vous injectez à ce sujet reste intrigante. Les Dahalo ne sont évidemment ni plus ni moins que des voleurs de beufs, de zébus pour ce qui concerne Madagascar, et la crise et les moyens décroissants ont encouragé ce type de profit via le vol de cheptels, classique.

Concernant les massacres, le rapport d’Amnesty nous apprend bien la seule réalité, qui s’éloigne des arraches de dents pour les mettre en collier mais et met bien en évidence une dérive des forces de l’ordre, ce qui est encore plus grave et explique certainement la vindicte populaire qui tend à se voir ici et là. Ce rapport indique que « « Les responsables présumés de ces violations massives, parmi lesquels des membres hauts gradés des forces de sécurité, doivent être traduits en justice, a déclaré Christian Mukosa. Le gouvernement doit demander à la communauté internationale, en particulier aux Nations unies, d’aider à mener une enquête véritablement indépendante. »
(http://www.amnesty.org/fr/news/madagascar-must-end-mass-killings-and-investigate-security-forces-2012-11-20 )


-Esclavage moderne au Moyen Orient : « Près de 1,5 million de travailleurs forcés (7%) se trouveraient dans les pays développés et dans l'Union européenne, 1,6 million de personnes (7%) dans la région formée par les pays d'Europe centrale et orientale et la CEI. On estime à environ 600 000 (3%) les victimes au Moyen-Orient. »
Vous citez : « Après deux années et huit mois à gérer trois enfants en bas âge, à dormir trois heures par nuit (à même le sol), à se nourrir des restes de la famille, à subir les viols du père et les violences de son épouse jalouse, elle réussit à rentrer au pays. Trente kilos en moins et mutique après avoir perdu l'usage de la parole brutalement. Un destin à l'identique de milliers d'autres. Les plus jeunes, encore mineurs, sont vendus à la classe moyenne malgache. »

Liban, Koweit, Arabie Saoudite : Les Sri Lankaises et les Indonésiennes sont aussi concernées par cette ignoble fait, s’indigner parce que cela est un fait qui reste trop étendu et en vouloir fermement aux pays qui laissent ces conditions de travail perdurer serait la solution, l’AFP concernant Madagascar diffusait cette information : « Le ministère de la Population a reçu plus de 600 demandes de rapatriement de la part des travailleuses ou de leurs familles. En 2010, près de 500 sont rentrées à Madagascar avant la fin de leur contrat, selon le SPDTS. Plus de 7.000 Malgaches travailleraient actuellement aujourd'hui au Liban. »

-. Les plus jeunes, encore mineurs, sont vendus à la classe moyenne malgache : A Madagascar il n’y a pas de ma connaissance, et je n’y ai vécu que 25 ans, de « vente » de femmes. En général il arrive que les familles qui en ont les moyens emploient des jeunes femmes qui vont alors faire partie de la maison, ce qui est à relever sera que les salaires peuvent être très bas, voire plus bas que les salaires minimums, et les conditions seront peu confortables, mais cela n’en fait pas un marché de vente d’êtres humains ce qui est tout autre chose.


Dans la conclusion je vous rejoins, à cela près que « infléchir son destin » aurait été plus faisable si les ingérences et soutiens de l’extérieur n’avaient pas permis que cette crise ne s’éternise et face place à toutes ces horreurs dans un pays fort de sa culture, de ses traditions et de sa gentillesse. La tradition occupe encore les âmes malagasy, qui composent un peuple courageux et travailleur, qui parvient encore à ne pas se laisser atteindre par la situation.
Les Malagasy sont des gens croyants et également  tournés vers les ancêtres, et en cela ils respectent infiniment nombre de rendez-vous familiaux ou communautaires, en ce qui va concerner la magie noire ou les gri-gri bien sûr c’est une terre qui porte ses us, mais ils ne sont pas présents partout et pour tout. Le sourire et l’effort se lit sur les visages, mêmes sur les visages les plus désemparés, vous trouverez l’humilité, et la grandeur d’âme.
Les faits atroces qui sont venus ponctuer l’actualité malagasy serviront à enclencher des actions pour qu’ils ne se reproduisent plus, et ont choqué tout un chacun, mais la plus grande sérénité que l’on pourrait offrir à cette terre riche, serait de la laisser se dessiner selon ses mérites et non selon les intérêts nombreux de ceux que vous avez-vous-même appelé des prédateurs, qui ne viennent pas toujours de l’intérieur."
Erika Cologon Hajaji

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