mardi 28 janvier 2014

Madagascar : Troisième République

L’annonce de la Troisième République a nourri l’espoir de tous les malgaches pour un monde meilleur, loin de la dictature avec la prospérité à portée de main. Nouvelle désillusion pour le peuple. Avec une démocratie balbutiante et mal maitrisée, Madagascar a sombré à deux reprises dans deux crises plus ou moins graves.


L’ère de la Troisième République a commencé le 19 août 1992, le jour où la nouvelle Constitution a été adoptée par référendum. Le 10 février 1993, le Professeur Zafy Albert est élu Président contre Didier Ratsiraka avec 66.74 % des voix contre 33.26. Il devient ainsi le premier à la tête d’une Troisième République qui se voulait plus démocratique et plus libérale, donnant plus d’importance au Parlement. Avec ce parlementarisme accru, la nouvelle Constitution a engendré une certaine instabilité au sein de l’exécutif, le Premier ministre étant élu par les députés. A l’époque ce poste était tenu par Francisque Ravony qui avait une vision totalement différente du Président Zafy. Les deux hommes se livrent alors une guerre ouverte. Francisque Ravony a résisté à plusieurs motions de censure commanditées par l’Exécutif avant de finalement céder sa place à Emmanuel Rakotovahiny le 30 octobre 1995. En effet, Zafy Albert a obtenu la modification de la Constitution par le référendum du 17 septembre 1995 et s’est vu accorder plus de pouvoir, notamment celui de nommer directement le Premier ministre sans passer par le vote de l’Assemblée Nationale. Mais l’engagement dans des circuits de financements parallèles et frauduleux a eu raison du régime du Président Zafy. Le 15 mai 1996, l’Assemblée Nationale adopte une motion de censure contre le gouvernement Rakotovahiny qui démissionnera 5 jours plus tard. Le Président Zafy sera finalement officiellement destitué le 5 septembre 1996 après un empêchement voté en juillet par les députés. Norbert Lala Ratsirahonana est alors nommé à la tête d’une transition qui a pour mission de préparer une élection présidentielle anticipée.

Plébiscité de 50.7 % des voix contre 49.3 % pour son rival Zafy Albert, l’ancien Président Didier Ratsiraka revient au pouvoir le 31 janvier 1997. Pour son mandat dans la Troisième République, Ratsiraka crée ce qu’il appelle une République humaniste écologique qui fait de la lutte contre la pauvreté une priorité absolue. Après un an à la tête de l’Etat, il fait adopter par un référendum une réforme constitutionnelle lui conférant plus de pouvoir le 5 mars 1998. Avec un régime présidentiel fort, la présidence de l’Amiral a connu une période de stabilité politique et économique. A la fin de son mandat en 2001, les indicateurs économiques du pays sont au vert avec une croissance régulière du PIB et le retour de la confiance des bailleurs de fonds. Toutefois, la croissance économique engendrée ne se reflète pas au niveau de la population qui n’arrive pas à se sortir de la pauvreté. Entretemps, l’industriel Marc Ravalomanana est élu à la tête de la Mairie d’Antananarivo en 1999. Gagnant en popularité, ce dernier décide de se porter candidat contre Didier Ratsiraka pour la présidentielle.

Les résultats officiels de l’élection présidentielle du 16 décembre 2001 plébiscitent Marc Ravalomanana de 46.21 % des voix devant Didier Ratsiraka, 40.89 %. Dénonçant des fraudes et s’estimant vainqueur dès le premier tour avec plus de 50 % des suffrages, le Maire de la Capitale refuse la tenue d’un second tour prévu le 24 février 2002. Une crise politique, avec des répercussions notables sur l’économie, secouera alors le pays jusqu’en juillet 2002. Janvier 2002 est marqué par le début d’une série de manifestations qui rassemblent quotidiennement des centaines de milliers de partisans de l’opposition sur l’Avenue de l’Indépendance à Analakely. Le 25 janvier, la Haute Cour Constitutionnelle entérine les résultats confirmant la tenue du deuxième tour mais Ravalomanana persiste et s’autoproclame Président de la République le 22 février. Il prête alors serment lors d’une cérémonie qui s’est déroulée au stade municipal de Mahamasina, une action désapprouvée par la communauté internationale. Les partisans de l’Amiral commencent alors à dresser des barrages sur les routes qui mènent à Antananarivo avec l’intention de couper les vivres à la Capitale.

C’est le début du bras de fer entre les deux hommes et des tentatives de négociations qui les ont emmenés notamment à Dakar à deux reprises. Le 29 avril, la Haute Cour Constitutionnelle proclame finalement Marc Ravalomanana Président de la République, élu avec 51.46 % contre 35.9 % pour Didier Ratsiraka, une déclaration contesté par ce dernier. Le 6 mai, une nouvelle cérémonie d’investiture s’est tenue toujours au stade de Mahamasina, mais cette fois, avec la présence de plusieurs représentants de la communauté internationale. Les partisans de Ratsiraka renforcent alors les barrages autour d’Antananarivo. Ravalomanana fait alors appelle à des réservistes pour épauler une partie de l’armée acquise à sa cause pour démanteler les différents barrages et pour libérer les dernières villes embrigadés par les éléments du désormais président sortant. La crise de 2002 prend finalement fin en juillet avec l’exil en France de Didier Ratsiraka.

-----> Les législatives anticipées du 15 décembre 2002 confirment la légitimité du pouvoir de Ravalomanana car le parti du Président, le « Tiako i Madagasikara » remporte 132 sièges sur 160 à l’Assemblée nationale. Son règne peut alors commencer.

Une fois l’année 2002 passée, le premier quinquennat du Président Marc Ravalomanana a été plutôt calme et stable, comme l’atteste le maintien du Premier ministre Jacques Sylla à son poste pendant toute la durée du mandat, chose rare à Madagascar. Sa popularité atteint alors des sommets et les parties de l’opposition se retrouvent minoritaires et partiellement estompées. La présidence de Marc Ravalomanana constitue une véritable révolution dans le monde politique malgache. Avec un style très chef d’entreprise, le Président se démarque totalement de ses prédécesseurs. Durant son mandat, les réformes ont alors été nombreuses avec la création de nombreuses institutions dont le Bianco pour la bonne gouvernance ou encore l’Economic Development Board of Madagascar pour faciliter les investissements étrangers. La présidence de Ravalomanana a aussi été marquée par une relation internationale renforcée. Les grands partenaires de Madagascar étaient alors l’Europe, les Etats-Unis, le Canada, la Norvège, le Japon, l’Inde et la Chine. Le Président Ravalomanana privilégie également l’intégration régionale notamment au sein de la Communauté de développement de l’Afrique Australe (SADC). Le bijou de Marc Ravalomanana restera à jamais le Madagascar action plan qui est un plan de développement s’étalant sur cinq ans et qui est sensé sortir le pays de la pauvreté en un temps record en se basant sur ses atouts naturels.

Le 3 décembre 2006, Marc Ravalomanana est réélu au premier tour avec 54.80% des voix. Il peut ainsi mettre en œuvre son programme de développement pour les 5 ans à venir. Le 4 avril 2007, il renforce un peu plus son pouvoir en faisant adopter une réforme constitutionnelle à la suite d’un référendum. A la suite de ce vote, les électeurs étaient également appelés à se prononcer sur la suppression des six provinces au profit de 22 régions. Le 23 septembre, le parti présidentiel remporte les législatives avec 106 sièges sur 127 à l’Assemblée Nationale mais avec une abstention qui frôle les 80 %. En effet, tout comme Didier Ratsiraka, la popularité de Ravalomanana a été égratignée par le manque d’impact de sa politique économique sur la vie sociale. De plus, il a été taxé de « dictateur » par ses adversaires politiques.
L’accession à la magistrature de la ville d’Antananarivo du jeune Andry Rajoelina le 12 décembre 2007, aux dépends du candidat présidentiel va marquer le déclin de Marc Ravalomanana. Depuis l’ère de ce dernier, ce fut la première fois que le TIM ne remporte pas les municipales de la Capitale. Très populaire Andry Rajoelina, homme d’affaire avisé qui a fait fortune dans la publicité, s’annonce comme Le challenger de Marc Ravalomanana. Par ses déclarations chocs, il se positionne d’entrée contre le Président en place.

Un projet encore en étude d’une location de 1.3 millions d’hectares à une entreprise sud coréenne en novembre 2008 participe au début de la contestation de l’autorité de Marc Ravalomanana, s’ajoutant à cela l’acquisition d’un jet présidentiel se chiffrant à 60 millions de dollars.

Andry Rajoelina se la joue de plus en plus provocateur et diffuse en intégralité sur sa chaine de télévision un discours de l’ancien Président Didier Ratsiraka. Piqué au vif, Marc Ravalomanana décide de fermer la télévision VIVA du jeune maire. S’en suivent alors des protestations et des manifestations sur le jardin d’Ambohijativo, baptisé depuis, « Place de la Démocratie » par Andry Rajoelina. La période janvier-février 2009 a été particulièrement sanglante. La ville d’Antananarivo a été mise à feu et à sang le 26 janvier où l’appel à la grève générale du jeune maire tourne à l’émeute. Plusieurs magasins et sociétés notamment ceux du Président ont été incendiés.

Par ailleurs plus de 80 personnes ont perdu la vie lors de ce que les journalistes qualifient de « Lundi noir ». Les manifestations des partisans d’Andry Rajoelina continuent alors de plus bel et le 2 février 2009, le jeune maire se déclare en charge des affaires nationales du pays. Le 7 février les leaders des manifestants ont entamé une marche vers le Palais présidentiel d’Ambotsirohitra. Cette initiative a été sévèrement réprimandée par la garde présidentielle qui a tiré à balle réelle sur la foule. Bilan, une trentaine de morts et plus de 200 blessés.

Le 8 mars, des soldats déclenchent une mutinerie qui sonnera le basculement de l’armée vers le camp d’Andry Rajoelina. Abandonné par l’armée, Marc Ravalomanana décrète le directoire militaire et confie les pleins pouvoirs au Vice-amiral Hippolyte Ramaroson et quitte Madagascar pour l’Afrique du Sud le 17 mars. Le lendemain le maire de la Capitale se voit confié la direction du pays par les hommes en treillis. 5dossier partagé par le site "l'info.re"

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