mardi 28 janvier 2014

Etat de non droit à Madagsikara, non "une" justice, mais "des" justices

témoignage d'une femme qui décrit l'incarcération à Antananarivo

****** LA CHUTE VERS L'ENFER ******

Des semaines de galères, des jours entiers à attendre, des demandes de liberté provisoire refusées, des promesses utopiques, le moral qui dégringole, la santé qui se décline peu à peu …

Le plus difficile pour une femme est la séparation avec ses enfants, il m'est arrivé de hurler, de pleurer en me demandant si un jour je les reverrai, et si je les verrai grandir ?

Que devaient-ils penser de moi ? Je les avais accompagnés un matin à l'école et je ne suis jamais revenue les chercher …Ils sont parti avec ma belle mère, en France, deux jours après mon incarcération et depuis plus rien, quelques petites lettres que j'arrivais à envoyer et puis c'est tout... Comment s'avoir ce qu'ils pensaient ? Pour la fête des mères j'étais comme beaucoup d'autres au fond du trou, toutes les mamans essayaient de ne pas penser à cette fête, mais quand j'ai reçu leurs dessins, ce fût un vrai déchirement …

De même pour la fête des pères, bien sure impossible de téléphoner, alors j'ai fais en sorte de pas y penser, c'était trop dur …



Durant mon incarcération, j'ai malheureusement perdu deux de mes amis, l'annonce est toujours brutale mais le pire est de s'avoir qu'on ne peut être prêt d'eux, que nous ne pouvons assister aux funérailles, que je serai absente quoiqu'il arrive….

L'être humain a une capacité incroyable à encaisser un nombre de chocs , pour ma part ça aura duré 2 mois , 2 Mois ou Mr Da n'avait jamais pu m'enlever mon sourire.... Mais dès l'instant où notre esprit ne suit plus, notre état se dégrade vite... Je ne rigolais plus, je ne sortais plus de la chambre, ce qui a alerté les pénitencières, elles me voyaient marcher de moins en moins bien, mon regard devenait vide, elles me disaient de me reprendre, mais je ne voulais pas, j'avais abandonné le combat...

L'ambassade de France a appris que mon état de santé se dégradait, elle m'a envoyé le médecin Français, puis le médecin du ministère, tous deux me donnèrent un traitement et constataient ma dégradation, mais je ne voulais prendre aucun médicament, je voulais arrêter mon combat…. Mes copines de cellules essayaient de me redonner du courage, mais rien y faisait, j'avais du mal à respirer, à marcher et mon bras gauche me faisait mal, je maigrissais à vue d'œil, je devenais muette, j'étais vidée et j'avais perdu mon sourire ....

Je me rappellerai toujours de cette matinée du 29 Juin, alors que je tenais le petit Harnès dans mes bras, le bébé d'une détenue, on est venue me dire que j'avais une visite importante ….En trainant des pieds, je me rends à l'infirmerie et je vois des médecins, ainsi qu'une personne d'un Ministère, j'étais terrifiée, qu'allaient ils encore m'annoncer ? Ils me posent des questions sur mon état moral, et pourquoi je ne voulais pas me soigner … Je leur réponds que je ne veux plus continuer le combat, à quoi bon, Monsieur Da a de toutes façons gagné, il m'a tout pris : mon mari, mes enfants, ma dignité, ma liberté et ma santé !! Je ne veux plus me battre contre lui, ni contre personne !!!! J'arrête là, terminé ....laissez moi au moins mourir en paix !!!"...


Les chambres : Nous sommes entassés  et les bêtes grouillent de partout , je ne comptais même plus les cafards sur moi le matin ...Un enfer ou l'on essai de survivre , chaque jour  passé est une victoire ...
Les chambres : Nous sommes entassés et les bêtes grouillent de partout , je ne comptais même plus les cafards sur moi le matin ...Un enfer ou l'on essai de survivre , chaque jour passé est une victoire ...

MD pour Mandat de Dépôt.

Lundi 21 Mai 2007, 7h30 du matin… Je viens de déposer mes enfants à l'école Française, le temps de les embrasser, et ils sont déjà en train de jouer dans la cour ; à ce moment là, je suis loin d'imaginer que je ne verrai plus mes enfants avant une très longue période….

9h00, arrivée au tribunal de Tananarive. Accompagnée de mon avocat, nous nous dirigeons au niveau du Parquet, cela dure des heures, nous sommes trimbalés de bureaux en bureaux dans des couloirs ou règne la confusion la plus totale;la chaleur, le grouillement des gens de toute part, les cris ....

D'un coup, on nous convoque au premier étage , devant Madame le juge, à cet instant, les choses tournent très vite sur notre dossier est marqué en rouge "MD " ( Mandat de dépot) ....Serge et moi sommes interrogés sur une histoire dont je ne comprends toujours pas a ce jour le déroulement des faits , on m'accuse de complicité de tentative de meurtre !!!! Mais sans aucune preuve , ni témoin , juste fondu sur des" peut être" !!! Vers 16h00 le verdict tombe : Nous sommes mis tous les deux sous mandat de dépôt pour "complicité de tentative de meurtre" !!!

Je supplie monsieur Da, le plaignant, d'arrêter tout cela, en pleurs, je lui dis que mes enfants sont seuls à la maison et que je ne peux pas les laisser !!! Que je ne comprends rien à cette histoire et encore moins cette soit disant tentative de meurtre !!! Mais il m'a regardé en face, très content de lui, il n'en avait rien à faire de ce que je pouvais bien lui dire..."

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Misaotra!